"Allez, juste un verre, quoi !", "T’es pas drôle !", "Une petite bière, c’est rien !" ; des réflexions à éviter ou à contrer quand on en a décidé autrement. © alcool-info-service.fr 

Santé

Vivre mieux avec moins d'alcool

"Vivre mieux avec moins d'alcool" est le thème du Dry January, mois de janvier qui invite à vivre avec sobriété sa relation à l'alcool. À en parler tout du moins. Car, s'il incite à limiter sa consommation d'alcool après la période des fêtes de fin d'année, ce mois de la modération est aussi l'occasion de faire un point sur un ingrédient sacrément toxique.

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Entretien avec Julie Logerais, infirmière à la plateforme Addictologie du Centre hospitalier.

Quels sont les objectifs de ce mois de janvier où l'on invite à diminuer, voire arrêter, sa consommation d'alcool ?

Julie Logerais : tout d'abord, nous ne souhaitons pas mener de discours hygiéniste ou moralisateur. C'est pour cela que notre campagne rappelle les recommandations de l'OMS, selon lesquelles la consommation d'alcool ne doit pas être quotidienne et se limiter à deux verres par jour. L'objectif du "Dry January" est aussi d'inviter les consommateurs à faire l'expérience d'une vie sans alcool pendant quelques semaines, et à questionner leurs habitudes, leur relation à cette boisson, qui peut agir comme un stimulant, ou anxiolytique et devenir problématique à la longue. Cette relation peut venir d'habitudes familiales, socio-culturelles... Boire de l'alcool est culturel, c'est parfois même un passage initiatique, démarche souvent cautionnée par la famille. Or, boire de l'alcool comporte des risques.

Quels sont les signes d'alerte ? Les signes qui montrent que l'on est passé d'un usage raisonné à un usage à risques ?

Julie Logerais :lorsque l'on a du mal à arrêter de consommer, que l'on y pense souvent, qu'on passe du temps à récupérer de ses consommations, c'est problématique. Lorsqu'aux dommages sur la santé s'ajoutent des problèmes relationnels - une sensibilité exacerbée entrainant des disputes, conflits, voire une séparation, une difficulté à se lever le matin pour aller travailler, des problèmes juridiques si l'on est arrêté en état d'ivresse, de la violence conjugale, et des soucis d'argent. L'un de ces signes peut déjà questionner sur le caractère pathologique de sa relation à l'alcool.

Quels bienfaits observent celles et ceux qui font l'expérience d'une abstinence pendant quelques semaines ?

Julie Logerais :dès que l'on baisse sa consommation d'alcool, on a les idées plus claires, un meilleur sommeil, de meilleures relations avec ses proches et ses collègues... On se sent plus en forme et ce regain d'énergie favorise l'épanouissement, y compris sexuel. La qualité de la peau s'améliore également.

L'Alcool est misogyne

Au sein de la plateforme Addictologie, recevez-vous autant de femmes que d'hommes ?

Julie Logerais : nous recevons plus d'hommes que de femmes, mais sur le plan national, la tendance tend à l'équilibre. De plus en plus de femmes, surtout parmi les plus jeunes, consomment de l'alcool de façon exagérée. Nous recevons aussi des femmes cadres d'une quarantaine d'années qui observent leur dépendance à l'alcool. Elles prennent un verre, deux verres de vin le soir en rentrant et finissent par une bouteille. L'alcool agit comme un anxiolytique.

Aujourd'hui les femmes boivent-elles de plus en plus ou osent-elles davantage en parler ?

Julie Logerais : Les deux. Elles consomment davantage et commencent à en parler. Mais, il y a encore un vrai décalage de perception culturelle. Comme le disait  Charlotte Peyronnet, invitée à la librairie Chez Simone à la mi-janvier, et auteure de "Et toi pourquoi tu bois ?", une femme qui boit, c'est un sac à vin, une femme facile, une mauvaise mère. Nous nous retrouvons donc avec de situations de femmes qui boivent en cachette, donc pas dépistées. Et qui nous arrivent dans un état cataclysmique.

Les femmes supportent-elles aussi bien l'alcool que les hommes ?

Julie Logerais : Non. Au-delà de la corpulence, qui créé une différence d'assimilation, l'organisme des femmes contient proportionnellement plus de graisse que celui d'un homme. Comme l'alcool ne se dilue que dans l'eau et pas dans les graisses, à consommation d'alcool équivalente, l'alcoolémie sera plus élevée chez une femme que chez un homme.

Des soins très individualisés

La prise en charge de cette maladie donne-t-elle des résultats encourageants ?

Julie Logerais : malheureusement, il n'y a pas de traitement miracle. L'addiction à l'alcool est complexe et difficile à soigner. Mais la prise en charge est aujourd'hui plus complète et diversifiée. À chaque problématique correspondent des solutions. Et les soins sont personnalisés. Chaque cas est unique. En outre, les consultations peuvent être anonymes. Il est donc essentiel d'en parler, pour sensibiliser, et prévenir des risques encourus.

Alcool Info Service :  0 980 980 930, tous les jours de 8h à 2h, appel non surtaxé et anonyme. Adresses des professionnels sur www.alcool-info-service.fr et www.santepubliquefrance. Cette année, la Ville de Bayonne s'associe au Centre hospitalier pour sensibiliser aux méfaits de l'alcool et rappeler les recommandations de l'OMS (deux verres par jour et aps plus de dix par semaine)